L’enfant d’une putain
5 février 2013
Il est né y’a longtemps, il a tout connu tout vu. Tous les jours tous les temps toutes les pièces, il est né il est mort il est ressuscité, il pleure de savoir à l’avance comment ça va exister, comment il va devoir serrer les dents, quand il voit les autres réussir mieux que lui, parce qu’ils sont des frères, dont naissent des enfants, d’autres enfants qu’eux, qu’il aime et déteste à la fois, parce qu’ils vont devoir souffrir les mêmes affronts mais ce sont que des enfants, on peut pas leur raconter. Il sourit alors, dit vous êtes mignons vous deux ça fait combien de temps ? Et les gens répondent et lui meurt un peu plus parce qu’il doit sourire à la place de dire la vérité. Vous voyez pas ? Inconscients, on n’est chaque seconde plus proche du précipice, et quand à son tour il retrouve son printemps, il oublie qu’il a dit ça, il en a honte car il y croit et oublie dans sa poche ce qu’il a pu maudire, fait semblant et puis ça se remet en route car il est bien fait. Il est pas toujours beau, il peut être très vilain même, pervers, manipulateur, froid, méchant, ambitieux, carriériste, dégueulasse, il aime quand ça sent le sexe pendant des heures, il aime quand on a mal parce que ça lui rappelle qu’il est vivant, qu’il est là et qu’il est inoubliable, avec l’arrogance des gens qui savent qu’ils sont aimés quoi qu’il en coûte. Il prend. Il est hédoniste, il aime pervertir les gens, truquer, plus y’a de fils emmêlés plus il est content. Quand il jouit juste après il voit tout sans filtre et là il se rappelle que tout ça pour ça, tout ça pour cette seconde et demi, les gens sont décevants, les gens sont mièvres, petits, accrocs. En demande. Ca le dégoûte il a envie de partir mais où ? Partout où il ira, il se fera reconnaître. On le voit de loin, il brille, on le redoute mais on l’attend. On sait qu’une fois qu’il a mis le grappin sur quelqu’un, c’est carbo. Carbo pour des jours, des mois, des années, une vie peut-être. C’est sa malédiction. C’est un enfant de putain, tout le monde l’accueille parce que c’est son destin de se faire aimer par des gens qu’il n’aimera plus. Ah oui on n’a pas dit son nom : il s’appelle Amour en français, mais il a appris à dire son nom dans toutes les langues qui sont elles aussi faites pour lui.
j’aime quand tu poses ta plume !