J’entre, ce n’est pas la première fois. Les autres j’étais fringuée comme une fille qui traîne au quartier, elle m’avait déjà jugée mais sur un malentendu je la comprenais. J’ai le chic pour donner l’air que je suis pas famée, une fois à Andorre on m’a mise dehors d’un outlet Zara (cette phrase sonne comme du Vaness la bomba) parce qu’on m’a prise pour une pick pocket roumaine (spa sympa pour eux p.s). Faut dire qu’à l’époque c’était la mode des talons aiguilles qui ressemblent à des baskets, je portais ça mais elles étaient un peu grandes et un jogging. Pourquoi ? Je ne sais plus. C’était il y a longtemps, j’étais en vacances et en chagrin d’amour sûrement mais comme d’habitude depuis que j’ai l’âge de distinguer un chat d’un loup. Elle jugeait le fait que je caressais les vêtements comme les meufs qui caressent les vêtements (©Elodjie pour « caresser les vêtements »), ça m’avait saoulé mais confere plus haut, j’acceptais le quiproquo.
Quand soudain, un an et demi plus tard, je retraîne mes guêtres dans l’établissement, toujours sous surveillance nazie de la tenancière qui m’accueille cette fois avec le demi-sourire de la meuf qui se dit « tiens elle a un chapeau + des baskets = touriste = per diem à dépenser = enrobe la de commerce ».
J’apprécie. Je me dis que j’arrive à faire illusion. Je fais le tour et entreprends un rapprochement entre mon corps et un petit pantalon en laine Dries von noten (j’ai dû regarder pour l’orthographe) jaune (le pantalon).
Sté pas mal.
Je me tâte. au sens fig.
Je demande son avis
elle me tord le sourire impoli de la meuf qui a fait commerce parce qu’elle a gratté l’assurance vie de son trop vieux mari claqué oups sous un oreiller.
J’hallucine
j’aurais dû savoir qu’on serait jamais copines. « Qu’en pensez-vous ? »
Ah nan mais c’est trop serré aux cuisses là.
… Dis moi quelque chose que je ne sais pas.
Ah nan c’est vraiment trop serré, pourtant c’est un grand 40, toutes mes clientes qui l’essaient ont le problème inverse.

SMOKING : « vous avez des ciseaux ?… Merci. Oh pardon, j’ai découpé votre pantalon et oh, zut, tous les vêtements qui me sont tombés sous la main dans un geste imprécis, ah même vos cheveux ? Oh pardon je suis navrée car oui je sais ce que navrée signifie même si j’ai un IMC supérieur à 8×2 virgule sale pute ».

NO SMOKING : … « merci pour votre PRECIEUX avis ».

Voilà ça s’est fini comme ça, avec côté Cour elle et une vieille cliente avec de fausses dents et des problèmes de riche (« il faisait si froid dans notre résidence secondaire en Ecosse que nous n’avons pas pu organiser le dîner d’actionnaires que nous avions planifié, dixit Agecanonix) et côté jardin ma chubby pomme qui enlevait le pantalon auquel je n’aurais pas droit parce que j’avais mangé hier soir au dîner comme une vilaine.

J’ai pas tellement dit au revoir, je suis sortie et j’ai réfléchi, cette pute m’avait fait me sentir comme à l’époque, quand un garçon m’aimait pas parce qu’il préférait une fille sage et qui rentrait son cul dans un 501. Comme quand je vois des meufs qui ont toujours les cheveux propres et des mains de pianiste, comme quand j’en vois une conclure facilement, draguer facilement, pendant environ 200 pas j’ai pensé à tout ça.

Et puis finalement je me suis dit que je me sentais quand même très bien comme ça, avec tout ce qui fait que je peux être un sosie foireux de Shrek ou de scarlett ou de Grincheux ou que je peux être aussi Vaness la bomba et aussi tout ce que j’ai envie d’être à condition de trouver un pantalon OU IL N’Y A PAS DE PINCES AUX CUISSES CAR JE SAIS QUE C’EST PERDU D’AVANCE. Du coup j’en ai acheté un autre, beaucoup plus beau, et j’emmerde cette petite pute avant de la remercier de m’avoir rappeler d’apprécier mes cuisses auxquelles on peut s’accrocher en cas de naufrage. Amen. Bonne journée.

ma si mignonne affiche !

16 janvier 2013

ma si mignonne affiche !

du 28 janvier au 1er février à La Loge

On peut pas toujours choisir ce qui nous fait plaisir ou pas. Le goût du café au lait sucré par exemple, ça peut être réconfortant parfois et écoeurant à d’autres moment pourtant c’est toujours le même produit. D’une heure à l’autre le souvenir du café au lait sucré peut évoluer, rappeler un matin sans lumière ou au contraire un 4h sans lumière et pourtant chaud. On n’a pas de prise sur tout ce qui nous touche, c’est un peu vertigineux de laisser le volant à quelqu’un qui n’a pas tous ses vaccins ni son permis. Ca l’est de se laisser contaminer, centimètre par centimètre, de ne plus avoir de double commande d’aller sans phare ni fard, d’aller beaucoup plus loin que ce qui était convenu. On a tous le vertige un matin comme ça, c’est pas aisé d’ouvrir son zip et de montrer ce qu’il y a dedans, ça donne pas envie quand on n’est plus vierge d’émotions, quand c’est pas la première fois, qu’on sait bien qu’il y a un trou dans la coque et qu’on pourrait prendre l’eau si l’autre est pas prudent. Combien de marins, sérieux combien de marins combien de capitaines qui entreront dans ces sombres flots ? C’est pas pompeux c’est de la littérature, je le cite pas pour étaler quelque chose mais parce que si un mot existe pour l’exprimer autant l’utiliser non ? J’ai jamais cru en cette tempête, j’aimerais que vous soyez sympas et que vous rembobiniez jusqu’à ce que je rentre chez moi sans faire de détour sur mon tout petit bateau qui ne serait pas pimpé, sans torche ni filet, pour que le chemin jusqu’à mon cou soit moins long, juste avant que je ne me sois barricadée pour que jamais personne ne m’accède. Oh merde, je viens d’écrire de la mauvaise varièt, ça n’est pas une bonne journée.

C’est juste que j’ai regardé la date et y’a 10 ans tout pile ça sentait le fer et l’hôpital le 15 janvier, ça sentait aussi le sapin pour à peu près toutes les choses agréables dont les autres avaient l’air de jouir autour de moi. J’ai toujours le goût du sol froid sous le pied même 10 ans après, j’ai su à nouveau ce que c’était de jouir de quelque chose, j’espère pouvoir jouir encore et dezipper pour laisser entrer. Mais demain, parce qu’aujourd’hui n’est décidemment pas mon big day, me suis cramé les petites cheveux en allumant une clope sur le gaz, je ressemble à une blédarde qui aurait fait un mauvais brushing au fer à repasser.

It comes and go, comes and go

quand je suis arrivée ici il y a deux ans moins un mois, j’avais la tête ailleurs, je me sentais libre de pouvoir être la seule à avoir les clés de chez moi et je m’asseyais dans la cuisine pour manger du fromage en pleine nuit parce que je faisais CE QUE JE VOULAIS. C’est pas très intéressant mais vous êtes pas obligés de lire, ce qui a changé c’est que je suis assise à la fenêtre du salon à me demander ce qui a changé, j’ai compris d’autres trucs entre temps, j’ai deux petites années de plus ce qui fait quasiment 720 jours au mot près de chaque minute dans ma peau, sans pouvoir ne pas traîner avec moi, d’autres mots de passe à ma messagerie gmail, les mêmes souvenirs plus d’autres dont je me rappelle plus, des mauvais souvenirs, à peu près le tiers des 720 nuits passées à chercher quelque part / à regarder en me demandant ce que je foutais là et même si j’étais pas là où est ce que je pourrais bien être au fond ? un sentiment d’éternité que je déménagerai toujours avec moi, des trucs que j’ai jeté pour pas retomber sur des cartes postales que j’ai pas envie de lire la prochaine fois que je déménagerai, d’autres musiques en collier, des tailles de sexe des tailles de mensonge des tailles de discussion parce qu’on a que ça à faire de se l’expliquer quand ça coule pas de source, tant mieux, le pire arrive toujours en premier chez moi et j’avais signé pour un supplément colin maillard avec mon cerveau, on est le 5 janvier 2013 et j’espère que j’aurai un peu d’affection un peu honte un peu le sourire quand je relirai ça la prochaine fois que je déménage. J’ai jeté ma robe verte, je ne peux plus écouter cette chanson mon Dieu quelle nuit d’enfer, pourquoi est ce qu’on est capable de se faire si mal, je veux juste avoir la sagesse de ne pas recommencer dans un autre appartement, à me torturer avec des tocardes, on ne s’octroie que ce qu’on veut s’octroyer et j’aimerais bien avoir le courage de m’octroyer un peu de bienveillance et de franches rigolades et des après-midi n’importe où sur la plage en étant ancrée dans le sable pour profiter de ce qui existe sans penser à tout ce qui n’existe pas encore. On reprend sa respiration maintenant, ça va ça vient, on verra bien.

La dernière fois je suis partie sans dire au revoir, la fois d’avant je suis partie sans dire au revoir est ce que quelqu’un peut rester pour que je lui dise au revoir cette fois ci ?